Entrer dans une démarche d’individuation
Le processus d’individuation consiste à devenir soi. Plus vite dit que fait. Théoriquement, cette démarche veut que l’individu sache différencier ce qui constitue la partie qu’on souhaite montrer aux autres, «l’apparence» pourrait-on dire, cette partie publique, affichée de sa personnalité (nommée la Persona par C.G. Jung), la partie intérieure ou privée (nommée le Moi par C.G. Jung) et la partie refoulée qui lui permet de s’adapter à son environnement (nommée Ombre par C.G. Jung). La démarche prend du temps. Elle permet cependant de prendre conscience de la différence entre l’image renvoyée aux autres versus son monde intérieur, ceci afin de se rapprocher de son être véritable. Cela renvoie aux dimensions multiples du genre, aux rôles attendus en fonction de notre appartenance visible au masculin ou au féminin, et à l’identité, autrement dit qui nous sommes au plus profond de nous-mêmes. Le genre perd alors de son importance. Ce long exercice amène à cultiver la différence, mais il s’agit d’éviter le piège d’entrer en compétition et de chercher à être meilleur que l’autre, l’objectif étant de s’individuer. Réussir à intégrer les différentes facettes permet de s’accepter sans toutefois projeter nos ombres sur les autres, ce qui favorise l’acceptation d’autrui également.
Se raconter pour se définir soi-même
Un autre moyen consiste à faire le récit de qui l’on est, comment on se ressent et de quelle façon on se voit. Cela nous redonne la force d’agir sur notre vie plutôt que de laisser à l’autre le pouvoir de nous définir. Emilio Pitarelli appelle cela l’autonormie, c’est-à-dire définir nos propres normes, notre propre chemin. Dans l’interaction, cette approche pousse à l’empathie en invitant à s’intéresser réellement à l’autre, en le-la laissant se raconter, se définir au-delà des stéréotypes.
Cultiver la psycho-diversité
Aujourd’hui, on valorise la biodiversité en incitant à planter varié, à mélanger. On peut faire de même avec les individus. La proposition est de faire valoir la psycho-diversité et la socio-diversité car c’est ce qui rend vivant. Un groupe fonctionne bien lorsqu’il est fait de timides, de bavards, de rigolos, d’introvertis, etc. Cultiver la diversité dans les aspects psychologiques et sociologiques peut contribuer au développement d’une masculinité plurielle.
Définir des buts communs
Une pluralité de masculins peut effrayer à moins que les gens soient mis en contact dans toute leur diversité. Car on sait que plus on se confronte à l’autre différent, plus on l’accepte, comme cela a été démontré par plusieurs votations en Suisse. Les cantons villes sont plutôt bienveillants à l’égard des cultures étrangères alors que les cantons campagnes moins soumis à la diversité y sont plutôt opposés. La rencontre permet d’être rassuré, de découvrir l’être humain, ce qu’il a d’intéressant.
Croiser nos appartenances
Plutôt que de parler d’homme ou de femme, la proposition est aussi de concentrer son attention sur ce qui réunit. Car lorsque les buts sont partagés, la différence devient moins importante et elle sert parfois même à mieux atteindre l’objectif. L’exemple des mineurs américains est éloquent. Dans la mine, les travailleurs blancs et noirs travaillaient en bonne harmonie, réunis par la même finalité, alors qu’à cette époque, l’hostilité entre ces groupes était à son comble dans le pays. En croisant nos appartenances, on intègre la pluralité des êtres humains, la richesse des mélanges et on va se retrouver sur des intérêts ou des valeurs fondamentales.
En conclusion, la vision binaire - noir ou blanc, toi ou moi, juste ou faux - fonctionne bien en mathématique, mais pas avec l’être humain. Pourtant elle influence souvent nos appréciations, alors que les gens sont à la fois intelligents et stupides, sympathiques et antipathiques, masculins et féminins, charmants et désobligeants. Enrichissons le champ des possibles en cherchant à éviter de couler l’homme dans un moule et en favorisant le développement d’une masculinité plurielle.