Dossier: Troubles du comportement et médication
Alors que par le passé, l’éducation privilégiait l’adaptation au monde extérieur, elle valorise aujourd’hui l’écoute et la compréhension des besoins, dans un contexte qui a notoirement changé. Nés dans une société transformée par les technologies de l’information et de la communication, ces jeunes vivent et vivront avec Internet. Ils sont hyperconnectés, curieux et familiers de l’immédiateté. Mais tout cela a un prix.
Les professionnel-le-s de l’éducation s’accordent à dire que les jeunes sont généralement plus vifs que ceux des générations précédentes, mais également plus immatures. Les adolescents et adolescentes d’aujourd’hui ont été élevés par une génération de parents qui a évolué dans un monde en changements, riche en perspectives prometteuses, mais qui a aussi dû faire face à une augmentation de la précarité familiale, professionnelle, environnementale et politique : la fameuse génération X. La satisfaction des besoins individuels, longtemps déconsidérés au profit des intérêts collectifs, s’est imposée comme une condition impérieuse à l’accès au bonheur. Porteurs de cette promesse, leurs enfants se sont vus offrir de multiples choix – d’alimentation, de sommeil, de jeux, de lectures, de formations, de loisirs – afin de mieux répondre à leurs besoins individuels et d’assurer leur bonheur.
Protégés de tout et satisfaits dans leurs moindres demandes, ces jeunes ont grandi dans un environnement métamorphosé par le développement des techno-logies de l’information et de la communication. Ils utilisent quotidiennement les outils infor-matiques et ont, dès l’enfance, souvent eu un accès illimité à Internet à travers un téléphone portable. Face à l’offre proposée sur ce média numérique, ils sont devenus multitâches, assistent à un cours, visionnent une vidéo tout en participant à la conversation d’un groupe d’amis sur un des nombreux réseaux sociaux auxquels ils ont adhéré. Le corollaire de cette capacité à survoler de multiples domaines d’intérêt est la dispersion. Ils peinent à se concentrer pour approfondir un sujet. Leur curiosité est facilement satisfaite et ils ne connaissent pas ou peu la frustration. Comparés aux générations précédentes, ils sont aussi restés protégés des dangers de la vraie vie, bien que très engagés dans toutes sortes de relations sur les réseaux sociaux.
L’heure des choix importants arrive avec la fin de la scolarité obligatoire. Les attentes des parents sont maximales, car tout se joue pour leur enfant, mais il n’est plus question de leur imposer une voie à suivre comme par le passé pour ne pas risquer de compromettre leur bonheur. Le choix peut alors s’avérer cornélien, chaque sujet d’intérêt étant assorti de sa kyrielle d’exigences, d’inconvénients et de contraintes, qu’ils ne sont pas habitués à traiter. A ceci s’ajoute un contexte parfois chaotique, en particulier lorsque le noyau familial n’a pas résisté aux pressions liées à l’augmentation de la précarité. Quelle que soit la situation, réussir à traverser ce passage constitue un important défi et la tentation de reporter ce moment décisif est grande.
Il a paru infranchissable à beau-coup de jeunes accueillis à La Fontanelle ; ils ont plié sous le poids d’une trop grande responsabilité, ont paniqué et développé de l’anxiété, des phobies, voire de la dépression. Certains d’entre eux ont d’abord passé par un hôpital pour être soignés avant d’être encadrés par notre institution. Ce phénomène est nouveau, mais tend à se multiplier. Pour y faire face, l’offre institutionnelle s’adapte, revoit ses conditions d’admission, développe des collaborations avec des professionnels de l’univers médical, se familiarise avec la pharmacologie, apprend à faire avec des comportements psychotiques tout en respectant l’humain qui en est atteint. Les témoignages et avis d’experts qui suivent visent à nourrir la réflexion et à stimuler la créativité dans la prise en charge ; enrichissez la discussion en partageant votre point de vue sur la page LinkedIn de La Fontanelle.
Anne Kleiner